Éric Chevaleyre, le maître des lieux

Ses dessins lui ressemblent. Raffinés et complexes. S’il a appris le métier d’acteur, celui de dessinateur est dans sa nature. De sa main gauche, Éric Chevaleyre sort des merveilles de précision. Aussi aboutis qu’une photographie, ses dessins s’arrachent par les plus grands. C’est à lui que l’on doit le coffret de trois livres mêlant textes, photographies et dessins du Royal Mansour pour son ouverture. C’est lui aussi qui a réalisé la très jolie fresque du restaurant de la rue Moulay Ali, Le Petit Cornichon. Son talent, dont il s’avoue le premier étonné, fixe aussi ses souvenirs de voyage. Si l’homme aime être seul, il s’installe pourtant au cœur du paysage. Dans une rue de la médina, face à la Koutoubia, ou en pleine nature, en montagne ou devant l’océan, Éric Chevaleyre dessine le Maroc sous toutes ses coutures. Ses préférences ? “Ce qui ne bouge pas”, car pour lui “communier avec la nature nous dégage de toute vulgarité, de toute médiocrité”. Ses carnets de dessins sont un témoignage à la fois fidèle et enchanté de Tanger, Marrakech, Oualidia, Casablanca… Des heures nécessaires à autant de détails à reproduire sur papier, où il s’expose aux autres, à leurs regards et parfois à leurs jugements. “J’ai quitté Paris car ma carrière d’acteur ne se passait pas comme je le souhaitais et pour le manque de lumière. Mais je savais que Marrakech n’était pas une ville pour moi, je suis trop asocial. Pourtant, j’y suis depuis 8 ans”, avoue Éric. Il dessine maintenant au gré des envies de décorateurs ou architectes, qui le choisissent pour ses dessins purs, sans concept, essentiellement en noir et blanc. Tout est renseigné, jusqu’aux rainures des bois. Moucharabieh, zellige, plâtres et tissus sont autant de détails qui lui servent de terrain de jeu. Comme seul au monde, une utopie qu’il semble aimer, il se rappelle de ces heures à dessiner le théâtre antique d’Aspendos, en Turquie. “Le moment le plus heureux de ma vie”. Pour avoir grâce à ses yeux, il faut du raffinement. Et même s’il semble parfois insondable, qu’importe. Chez lui, il n’y a aucune place pour la demi-mesure.

S.J.

ec.eric.chevaleyre@gmail.com